Plusieurs nouveautés dans le bulletin de SpF cette semaine. Et notamment, les évènements qui peuvent avoir impacté l’épidémie : marché de l’Aïd, distribution de masques par la préfecture, réouverture des petits commerces, puis des écoles et restaurant… Alors que la directrice de l’ARS Mayotte avait annoncé qu’il n’y avait pas eu d’aggravation de cas lors du marché de l’Aïd de Majicavo Dubaï, ce bulletin évoque le contraire, « une recrudescence de cas a été observée suite aux célébrations de l’Aïd et à la réouverture des commerces ».
Pourtant, sur le graphique, sept à dix jours après les festivités de l’Aïd du 25 mai, le bâton du 5 mai ne monte pas dans les hauts mais affiche une moyenne de 30 cas positifs. Par contre, quelques jours avant, le pic correspond aux dépistages positifs dans les clusters dont la prison.
Une campagne de dépistage massive a en effet été lancée au sein du centre pénitentiaire après que 5 premiers cas aient été enregistrés. Avec l’aide des équipes du CHM et de la réserve sanitaire, 478 personnels et détenus ont été testés entre le 27 mai et le 3 juin (S22 et S23). En tout, ce sont 223 cas de Covid+ qui ont été enregistrés, dont 178 parmi les détenus, soit un taux de positivité de 56%. Plus de la moitié était asymptomatique. L’ampleur de ce cluster n’est pas assez mis en avant, il s’agit tout de même de 10% des cas totaux de l’épidémie, au moment où il est découvert.
Taux de positivité en baisse
Il est expliqué que sur cette semaine 23 (du 1er au 7 juin), le taux d’incidence (nombre de nouveaux cas rapportés à la population pour 100.000 habitants) à Mayotte était de 78 « alors qu’il était de 4,3 habitants au niveau national et de 27,5 en Guyane, seul autre département avec Mayotte qui reste à un niveau de vulnérabilité élevé », rapporte Santé Publique France. Les auteurs ont oublié qu’en Meuse, le taux d’incidence a frôlé les 27 dernièrement, et que dans la Marne il est de 21.
Bien sûr, 78, ça décoiffe ! Mais si on retire les 223 cas du centre pénitentiaire (un cluster très élevé pour notre département), le taux d’incidence décroit fortement. 223, c’est même exactement le nombre de cas positifs sur la seule semaine 23 (du 1er au 7 juin) ! En retirant l’effet de ce seul cluster sur une semaine et demi, nous obtenons un taux de positivité de 4%… Or, selon Santé Publique France, des clusters, il y en a 16 à Mayotte (dont 31 cas au centre de dialyse), comme dans d’autres départements de métropole d’ailleurs.
L’autre question que l’on peut se poser, c’est de savoir si le centre pénitentiaire qui totalise la grande majorité des cas sur cette semaine 23, a-t-il polarisé toutes les énergies, au point de délaisser les autres dépistage ?
Remarquons en tout cas, que le taux de positivité affiché par le bulletin était en baisse, « Après un maximum de 36,5% en Semaine 18, le taux de positivité a diminué pour atteindre 23,9% en S23 », du 1er au 7 juin.
Campagne électorale et grands mariages en vue
Si ces foyers sont le signe que le virus circule encore, 20 à 40% de la population serait asymptomatique, selon SpF, donc le risque de gravité suite à une contamination est moindre, « il semble que la sévérité de l’épidémie soit relativement faible (peu de cas admis en réanimation et mortalité faible). Cette dynamique propre au département peut s’expliquer par la jeunesse de la population. »
Il faut donc mettre l’accent sur les mesures pour contrôler davantage la généralisation du port du masque, et pour « consacrer des moyens concrets pour prévenir l’émergence de foyers dans des situations propices aux contacts étroits et prolongés », surtout dans cette période de campagne électorale, et à quelques jours de la saison des mariages. Le report de ces cérémonies comme cela se fait en métropole ne serait pas incongru.
L’impact des foyers épidémiques sur la tendance générale de l’épidémie est donc un élément prépondérant de l’analyse, « l’enjeux majeur de la surveillance épidémiologique est désormais celui de la détection précoce des clusters pour assurer l’application de mesures de contrôle immédiates », conclut SpF.
Le port du masque qui s’était banalisé, devient quasiment marginal, il faut de nouveau communiquer et en urgence, sur les mesures barrières pour éviter tout nouveau cluster.
Consulter le Mayotte_PER_COVID19_20200611
Anne Perzo-Lafond
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