Nous avions évoqué la modification des rotations des navires de commerce de la compagnie CMA-CGM desservant Mayotte. L’explosion depuis octobre 2020 (voir la courbe ci-dessous), des prix des containers en provenance d’Asie liée à la reprise économique mondiale post-Covid, a obligé les armateurs à s’adapter. Une embellie pour eux après 20 années de chute des taux de fret, nous apprend le site L’Antenne.com des professionnels des transports maritimes.
L’indicateur de référence des taux de fret maritime en container au départ de la Chine a pris +51% depuis avril 2021, indique Observatoire Europe-Afrique2030, « Sur les liaisons Europe-Afrique, l’impact sur le coût de transport maritime est de l’ordre de +1000 à +2000 euros par conteneur 40 pieds selon les liaisons.
Dans ce contexte, la compagnie CMA-CGM qui détient les trois-quarts des parts de marché à Mayotte, nous avait indiqué que la ligne Nord-Sud, « Noura Express », qui relie Jebel Ali (Emirats Arabes Unis) à Beira (Mozambique) en passant par Longoni, était touchée, « au lieu de 2 à 3 navires par mois, il n’y en aura plus qu’un, mais le nombre de containers qui approvisionnent l’île sera le même. Ils sont 250 à être traités chaque semaine, nous gardons ce volume là, les navires seront simplement davantage chargés ». Rajoutant que la ligne Est-Ouest vers Maurice et La Réunion, ne sera pas affectée, maintenant le rythme de 138 containers par semaine.
Embouteillages sur les quais
Nos voisins réunionnais par contre semblent davantage impactés, l’Australie ayant modifié sa ligne d’approvisionnement, moins de navires font escale à l’île Bourbon.
Selon nos échos, peu de marchandises font défaut dans les rayons des grands distributeurs de la place de Mayotte, « je n’ai pas de problème d’approvisionnement particulier », indique l’un d’eux.
Chez nous, la difficulté tiendrait donc moins dans l’approvisionnement, puisque le nombre de containers reste inchangé, que dans leur arrivée massive à Longoni sur un seul navire au lieu de deux ou trois, provoquant des difficultés de stockage pour les importateurs. Et pour des sorties de port au même rythme qu’auparavant, induisant des surcoûts de stationnement des containeurs à quai, bénéficiant à la gestionnaire du port, ou de surestaries, en faveur de l’armateur. Dans un second temps, la pénurie serait alors davantage engendrée par ces sorties ralenties de marchandises, que par leur absence du territoire.
Agrandir les surfaces de stockage pour les importateurs semble inévitable, mais cela a un coût qui sera répercuté, accélérer le dédouanement, tout cela additionné au renchérissement des surestaries, les prix pourraient s’envoler dans les caddies, comme nous l’avions craint.
Il reste également que les importateurs peuvent diversifier leur approvisionnement, la compagnie CMA CGM n’étant pas la seule au monde. Sa concurrente MSC (Mediterranean Shipping Company) présente à Mayotte, nous indique ne pas avoir eu besoin d’accroitre le nombre des navires, « nos volumes ne le justifient pas », ce qui serait mécaniquement le cas « s’il y avait une augmentation des volumes d’import », lié à un accroissement de la demande à Mayotte. Ce qui n’est actuellement « pas dans les prévisions » de la compagnie.
Ces perturbations ne devraient pas durer éternellement, et même si la crise sanitaire donne le « la », les professionnels pourraient en entrevoir la fin vers février 2022, « pour le Nouvel An chinois », lance-t-on sur le port de Longoni, histoire de resituer géographiquement le problème…
Anne Perzo-Lafond
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