« On ne parle plus aujourd’hui d’opportunité, de savoir si la piste longue sera faîte ou non », assure Christophe Masson. Pour le délégué de la DGAC dédié à ce projet, nous arrivons même à un « moment charnière » comme il l’indiquait ce jeudi matin lors d’une conférence de presse tenue au centre d’affaires de l’aéroport. C’est donc sous le menu ballet des avions s’apprêtant à toucher ou quitter la piste courte que l’habitué des grands projets – il a notamment supervisé les travaux du viaduc de Millau – déroule.
En fait de moment charnière, voilà la concertation réglementaire qui commence et qui trouvera son démarrage officiel en septembre avec l’ouverture d’une maison du projet en Petite-Terre. Véritable lieu d’incarnation du chantier auprès de la population, l’office sera accompagnée de tout un dispositif d’information et de recueils d’avis auprès de la population. Un site web est à cet effet d’ores et déjà en ligne, une lettre d’information paraissant tous les deux mois – au même rythme que des évènements thématiques – connaît déjà son premier numéro auxquels s’ajouteront des réunions publiques d’informations, des dossiers ainsi qu’un film de présentation. « Ce dispositif d’information et de participation du public doit permettre d’enrichir le projet, on sera à l’écoute », promet Christophe Masson. Lequel prévient toutefois : « ce n’est pas un débat public », en référence à une phase ultérieure dans le déroulé du projet, concomitante à l’enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique.
Un trio de défis propres à Mayotte
La période actuelle a aussi de « charnière » en ce qu’elle doit venir « sécuriser le projet », explique le délégué à la piste longue. On parle là de la phase « des travaux préparatoires », qui doivent trouver un terme à la mi-2022. Et pour lesquels s’emploient déjà « 80 à 100 personnes dans tous les métiers ». Il s’agit là de « définir le scénario optimal et sécuriser techniquement comme juridiquement le projet ». Pour ce faire « il faut prendre en compte
tous les enjeux », rappelle Christophe Masson. Certains sont plutôt classiques et inhérents à tout projet de cette envergure : les coûts, la continuité de l’aéroport ou encore le volet socio-économique. D’autres, « majeurs », sont spécifiques à Mayotte. Se pose ainsi un trio infernal de défis comprenant : les risques naturels, l’approvisionnement en matériaux et la protection de l’environnement comme du cadre de vie.
Sur ce premier point, les aléas liés au volcan sous-marin sont évidement au premier rang des préoccupations. « Des sujets importants et nouveaux » comme la stabilité des sols alors que la terre tremble encore, celle de l’enfoncement de l’île sous l’effet de la subsidence ou encore « les conséquences d’un éventuel tsunami sur la résistance de l’ouvrage ». À ces nouveaux sujets s’ajoutent la question des cyclones ou encore celle des conséquences du réchauffement climatique comme la montée des eaux.
Question approvisionnement en matériaux, « c’est pratiquement le sujet qui guide le calendrier du chantier ». « Il est inenvisageable de le débuter sans la certitude de l’avoir sécurisé », indique encore Christophe Masson. Plusieurs millions de mètres cubes seront nécessaires à la réalisation de l’ouvrage. De nouvelles carrières se feront alors jour en Grande-Terre comme en Petite-Terre et des importations doivent être envisagées. Ce qui implique de régler la question du transport pour acheminer les matériaux. Enjeux : ne pas fragiliser l’approvisionnement des autres chantiers, et ne pas perturber un réseau de transport déjà fragile. « On ne va pas mettre les camions dans les barges », ironise le délégué de la DGAC avant d’indiquer qu’il y aura « probablement des choses innovantes en matière de transport » et des ouvrages qui pourraient rester par la suite et venir s’intégrer à d’autres projets.
« La volonté politique est là »
Enfin, vient le sujet environnemental. Alerte dugong ? Non, répond Christophe Masson, considérant qu’aujourd’hui « rien n’est rédhibitoire en matière environnementale ». Toujours est-il qu’à l’évidence, le projet s’inscrit « dans un environnement sensible et riche, il faut le prendre en compte », avec par exemple, des mesures compensatoires. Il reviendra au Parc naturel marin de Mayotte et à l’Autorité environnementale de juger de la qualité de cette prise en compte.
Rappelons d’ailleurs que cette dernière autorité administrative s’était déjà exprimée avec un certain scepticisme en décembre dernier, pointant notamment la trop faible justification
du projet. « Ce n’était pas un avis sur le projet en tant que tel », rétorque le délégué à la piste longue. Un tel avis, formel, sera rendu par l’autorité en amont de l’enquête publique. « Nous l’avions sollicitée en avance pour avoir un cadrage, c’est à dire déterminer ce que l’autorité environnementale attend dans son dossier pour que, lors de la présentation, tout soit présent. Finalement, l’avis rendu en décembre est un peu le récapitulatif de tout ce qui doit figurer dans le projet ». Une stratégie visant à « sécuriser » donc.
Et si d’autres projets d’envergure, pourtant plus avancés à l’instar de l’aéroport de Notre-dame-des-Landes, ont trouvé terme avant leur concrétisation, une différence majeure oeuvre ici : « la volonté politique est là et est partagée », considère Christophe Masson.
G.M
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