Ironie du contexte, le marché du transport scolaire fait parler de lui alors que les bus sont à l’arrêt. D’après l’allocution du 1er ministre, la rentrée scolaire autour du 11 mai ne concerne que les primaires, celle des collégiens n’est prévue que mi-mai, sous condition d’une situation sanitaire acceptable sur le territoire.
Signé en 2015 pour trois ans, le marché des transports scolaires d’un montant avoisinant les 30 millions d’euros, a déjà fait l’objet de deux avenants, depuis son échéance en 2018, quand la loi en autorise un seul. Mais les passations successives ont été juridiquement contestées. Le cabinet qui assistait le conseil départemental dans la maîtrise d’ouvrage (AMO), n’avait pas été reconduit, et, depuis, une nouvelle compétence avait été choisie.
Les deux précédentes prolongations avaient été attaquées au tribunal par plusieurs transporteurs rassemblés sous l’appellation « Ouvoimoja Transports » (aucun rapport avec le Ouvoimoja titulaire d’un des lots… pratique !), qui jugeait que le maintien du marché en l’état favorisait le gestionnaire actuel, Matis (groupe réunionnais Mooland).
Cette fois, en raison du contexte d’urgence, le conseil départemental informait les transporteurs sur deux positions : son renoncement au rachat de leurs véhicules qui se pratique à chaque échéance de marché, et la prolongation d’un an du marché du transport scolaire.
Sans concurrence mais avec négociations
Ce dernier point recueille une « opinion défavorable » chez les transporteurs Alizés Transports Services, Ouvoimoja Transports et Transports Salimé, signataires d’un courrier en retour. S’ils ont conscience des freins provoqués par la situation sanitaire actuelle, dans un courrier au président du Département, ils proposent un entre-deux, une « procédure négociée sans publicité ni mise en concurrence ». Une solution « transitoire d’une année », qui permettrait au conseil départemental « d’organiser une nouvelle procédure d’appel d’offre pour 2021 ».
Cette proposition s’appuie sur l’article 2122-1 du code de la commande publique, invoquent-ils, qui doit respecter 3 critères : l’urgence, l’imprévisibilité et l’absence de faute. Ils justifient les deux premiers par « la crise sanitaire actuelle du covid-19 », quant au 3ème, une faute qu’on pourrait imputer à la situation d’avant crise, « elle peut être rattachée à la carence évidente de l’ancien AMO dans sa mission d’assistance au Département pour la préparation desdits appels d’offre. »
Ils appellent les entreprises de transport à se manifester pour participer aux négociations, sous réserve de remplir « les critères de qualification, de solidité technique et économique exigés ». Une formule originale à ceci prés que l’historique des coups d’éclat autour de ce marché impliquant une centaine de sous-traitants, incite à la prudence quant à une solution négociée.
Et dans l’éventualité où le conseil départemental maintiendrait son option de 3ème avenant au marché actuel, les transporteurs demandent une réévaluation des prix des prestations qui ne sont plus d’actualité depuis 2015, « les coûts du transport routier des voyageurs ont évolué depuis 2015, qu’il s’agisse des coûts de personnels, de dépenses de structure ou des coûts de maintenance. »
Anne Perzo-Lafond
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