La ministre des outre-mer a annoncé ce mercredi un énième durcissement des contrôles des arrivées aériennes. Après des exportations dans tous les outre-mer de cas métropolitains. De restrictions en exceptions prises ces derniers jours, va-t-on arriver à quelque chose de sérieux ? Parce qu’après avoir relayé la publication de l’interdiction de vols entre la métropole et les outre-mer que nous avions qualifié de « dérogatoire », nous aimerions rapporter des témoignages de contrôles stricts à l’arrivée. Ce n’est pas encore le cas.
Ce mardi, Roseline atterrissait à Mayotte vers 8h depuis Roissy. « Je devais subir plusieurs examens médicaux en métropole », nous explique-t-elle, un déplacement pour raison médicale impérieuse donc. Elle a avec elle son attestation professionnelle. En règle même avec les mesures postérieures énoncées par Annick Girardin.
Avant de débarquer à Mayotte, et alors qu’elle était encore dans l’avion, le chef de cabine vient lui demander si elle venait d’une région à risque. « Oui, Paris », répond-elle. « Ah non !, lâche-t-il en consultant un document, nous ne l’avons pas sur notre liste, Mulhouse ou la Corse oui, mais pas Paris. » L’Île-de-France étant une des deux régions les plus touchées de France, elle insiste. En vain. On l’interroge sur sa santé. Non, elle ne se sent pas fiévreuse. Une déclaration « sur l’honneur », qui l’inquiète, « surtout que plusieurs personnes toussaient dans l’avion, ceux qui ont de la température peuvent donc le cacher. » Heureusement l’appareil n’était qu’à moitié rempli.
Les transports en commun à l’épreuve du virus
A l’aéroport, elle est interrogée, « mais ils ne m’ont pas demandé de quelle zone je venais. » Elle ne passera pas par la tente de la Croix Rouge. Elle remarque, « je vais me mettre en quatorzaine, mais pour rejoindre mon domicile dans le centre de l’île, je vais devoir prendre des taxis. » Pas de problème lui répond-on, ce sera plus cher, mais ils ne prennent que les passagers de l’avion. Le chauffeur du taxi de 9 places l’informe que ce sera 3 euros, « parce que je ne peux pas prendre autant de personnes que je veux, pas plus de cinq ! » Ils partent à trois, les messages semblent être passés.
« Semblent », car à peine arrivé au Four à Chaux, le chauffeur s’arrête pour prendre une personne supplémentaire pour compléter. Roseline s’insurge, « mais nous sortons tous de l’avion pour nous mettre en quarantaine, il ne faut prendre personne de l’extérieur ! » Le chauffeur ne voudra rien savoir, et tout ça devant une patrouille de gendarmerie qui ne peut pas décrypter l’incongruité de la situation.
Des locaux réquisitionnés pour les “quatorzaines”
Dans la barge, pas de coin réservé pour ces fraichement arrivés de Paris, mais un mélange convivial d’éternuements. Ne parlons pas de la “quatorzaine” de la passagère fraichement arrivée qui devra aller faire des courses. Heureusement notre Roseline a tout prévu, “j’avais fait le plein avant de partir”. Tous n’anticipent pas autant.
Une somme de petits débordements qui peut alimenter une grande rivière de Covid-19.
Le 4ème vice-président du Département Issa Issa Abdou nous explique justement avoir demandé au préfet de réquisitionner des hôtels, internats, bâtiments militaires pour la mise en quatorzaine des passagers arrivant à Mayotte, “cela permettrait de protéger notre population et de limiter les risques de propagation du virus”. En l’absence de cette mesure de sauvegarde, il demande la fermeture de l’aéroport de Pamandzi, “c’est une question de cohérence et d’efficacité de nos actes”.
Anne Perzo-Lafond
* Prénom d’emprunt