Après deux semaines de détention provisoire, les deux braconniers surpris à dépecer une tortue le 25 juillet sont ressortis libres, avec une peine de 8 mois de prison ferme, mais aménageable. Leur complice, qui s’est cantonné à un rôle de chauffeur, écope de 3 mois de prison avec sursis. Déception des parties civiles, notamment Oulanga Na Nyamba, les Naturalistes et Aspas, et satisfaction en demi-teinte de la défense, qui évite au moins l’incarcération.
Les deux avocats de la défense, Me Andjilani et Me Ibrahim, se seront évertués à démonter que la lutte contre le braconnage passe par la pédagogie, et que “la pédagogie ne passe pas par Majicavo” assure Me Andjilani. Tous deux ont aussi largement questionné la méthode des policiers de la brigade de l’environnement, “parfaitement assumée” et ordonnée par le parquet. Celle-ci consiste à observer, et à interpeller les braconniers quand ils quittent la plage, pour faire des flagrants délits et saisir de la viande de tortue, qui est généralement enterrée dans le sable ensuite.
Dans ce cas, les policiers ont observé “à 60 mètres environ” avec une caméra à vision thermique, les braconniers saisir la tortue et l’emmener dans les fourrés, faire “des grands gestes”, et en sortir avec des seaux remplis de viande. Ils ont attendu que les malfaiteurs aient appelé leur chauffeur et soient remontés à bord pour interpeller tout le monde. Ou presque puisqu’un des braconniers a su s’enfuir.
Une méthodologie controversée
Pourquoi cette méthode ? Deux avantages : d’abord elle évite aux agents de se mettre en danger en tentant une interpellation sur la plage “à deux agents isolés sur une plage dans l’obscurité, contre trois ou quatre individus armés”. Ensuite, intercepter le véhicule avec ses occupants augmente considérablement les chances d’interpeller un maximum de protagonistes, la fuite étant bien plus aisée depuis la plage ou dans les bois. L’inconvénient majeur est régulièrement dénoncé par les avocats, mais aussi par des associations comme Sea Shepherd : en agissant de la sorte, les policiers s’interdisent de sauver les tortues. “C’est un débat, de savoir savoir si une tortue doit être sacrifiée pour que des gens aillent en prison” plaide Me Andjilani, quand son confrère se dit “choqué”. “Pourquoi ne pas changer la méthode et essayer d’en sauver plutôt ?” propose-t-il.
Un argumentaire qui aurait presque fait oublier leurs clients. “Ce n’est pas le procès de l’agence française de la biodiversité” (dont dépend la police de l’environnement NDLR) recadre la procureure. Cette dernière réclamait 10 mois ferme et maintien en détention pour les deux braconniers, et 6 mois avec sursis pour le chauffeur. Le tribunal s’est montré bien plus clément en excluant l’incarcération, mais aussi la saisie du véhicule qui était réclamée.
Quant aux trois associations parties civiles, elles obtiennent chacune 500€ de dommages et intérêt, qui pourront servir à financer leurs actions de prévention.
Y.D.
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