« 10h30, un arbre est tombé sur la nationale avant Poroani. Les agents du pôle sécurité de la ville se sont rendus sur place pour sécuriser la circulation. Les services techniques sont intervenus pour retirer l’arbre et rétablir la fluidité de la circulation ». A Chirongui, les évènements ont été consignés comme une pointeuse à l’entrée d’une usine, à 11h, c’est un poteau électrique rue de la Pharmacie qui a été sécurisé par EDM, etc. » Plusiurs communes de l’île ont fait pareil.
Une prise en compte des dangers potentiels par les mairies dont on avait pas eu l’habitude, et que l’on doit à la mise en place progressive des Plans communaux de Sauvegarde. 10 communes sur 17 s’en sont dotées. Des PCS quasiment inconnus jusqu’alors, et qui sont nés de la volonté de l’Etat d’impliquer les acteurs communaux, à Mayotte comme ailleurs. « Le maire est le premier responsable des opérations de secours », nous explique Etienne Guillet, directeur de cabinet du préfet de Mayotte, en charge de la protection civile.
Le Plan communal de Sauvegarde, c’est un peu le plan ORSEC pour les communes, explique l’infatigable sous-préfet, qui se rend de médias en médias pour décrypter la gestion de la crise. « Cela fait des années que nous travaillons avec les communes pour qu’elles s’approprient une culture du risque sur un territoire qui n’y était pas habitué ». Il confirme que l’émergence du phénomène sismique il y a quasiment un an, y a pour beaucoup contribué. « Kenneth vient confirmer qu’en travaillant sur l’anticipation, on progresse. »
Formation du cyclone à vue d’œil
Ce qui s’est concrétisé par la mise en place pour la première fois d’un prépositionnement des moyens : pompiers, CHM, Direction de l’Equipement, gendarmerie, « nous savions où ils étaient déployés, ce qui évite de rajouter des forces quand elles sont déjà présentes ».
La dépression s’est formée très rapidement, et dès la certitude qu’un phénomène musclé allait toucher l’île, « dès lundi », la préfecture a placé le territoire en pré-alerte cyclonique, et convoqué l’ensemble des acteurs, « nous avons tenu un premier Comité opérationnel départemental avec les maires dès mardi matin, activé H24. »
Une pré-alerte qui n’était cependant pas une alerte cyclonique teintée d’orange ou de rouge, synonyme de gravité du phénomène comme l’ont connu Grande Comore ou actuellement le Mozambique, avec des vents en rafale de 290km/h. Mayotte a donc évité le pire malgré tout. « L’œil de ce qui devenait un cyclone avait légèrement dépassé Mayotte, ne nécessitant pas de passer à une étape supérieure d’alerte, mais nous avons malgré tout subi les assaut de la frange du cyclone. »
Mtsamboro tire déjà des enseignements
La préfecture de son côté, a communiqué régulièrement des points de situation sur les dégâts, rajoutant de la transparence à la gestion du phénomène. La commune championne dans la communication de la gestion des PCS fut Chirongui, mais Koungou également, qui relate avoir abrité la second nuit, 412 habitants, alors que les agents de la commune « sillonnaient les quartiers de bangas afin de détecter d’éventuelles fragilités au regard des vents violents et des précipitations ».
Mtsamboro en tire déjà des conclusions pour l’avenir de court et moyen terme : « Le passage de ce phénomène météorologique Kenneth est l’occasion d’interroger la problématique de la gestion des eaux pluviales et de la protection des rivages et des ravines dans toutes les communes du Département », et interpelle aussi sur « la fragilité du réseau routier ».
Des points de « dangerosité » ont été pointés, avec un caractère d’urgence sur « la falaise à la descente du lieu-dit ‘radar’ à l’entrée du village de Mtsahara au niveau de RN1. « Il convient donc de tirer les enseignements de cet événement climatique, dans une logique d’accélération des efforts des pouvoirs publics en faveur de la prévention et de la préservation de la sécurité des personnes et des biens sur l’ensemble de notre Département », conclut le maire.
Il ne faut pas négliger le côté bénéfique du phénomène pour nos réserves en eau, même s’il n’y avait pas lieu d’être inquiet selon Etienne Guillet : « La retenue de Dzoumogné était pleine, et celle de Combani l’était à 96%, et est désormais à 100,3% grâce à surélévation à la suite de la crise de l’eau. »
Si le premier cyclone depuis Kamisy en 1984, n’a pas commis trop de dégâts, c’est qu’il n’a pas touché l’île de plein fouet, mais aussi que la prise en charge de la protection des population par les maires a permis de réduire le maillage et de quasiment personnaliser la protection sur ce petit territoire.
Anne Perzo-Lafond
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