Depuis la loi Egalité Outre-mer, Mayotte intègre le dispositif national : les grosses enquêtes quinquennales globales ont laissé la place à des enquêtes « tournantes » sur un cycle de cinq ans, avec des modalités différentes selon la taille des communes.
« Les communes de plus de 10.000 habitants sont recensées tous les ans sur un échantillon de 8 % de leurs logements », explique l’INSEE dans un communiqué “Mayotte-Insee recensement”. Donc, au bout de cinq ans, 40 % de la population est ainsi recensée dans ces communes et c’est sur cet échantillon que s’appuient les résultats. « Le principe de cette méthode impose que l’on dispose d’une liste exhaustive de l’ensemble des logements de la commune et que ceux-ci soient clairement identifiables de façon pérenne ». Les nombreux travaux techniques préparatoires ont débuté. Nécessitant des délais, et notamment des réflexions nécessaires à la prise en compte des spécificités du bâti de Mayotte, qui amènent en 2021 pour une 1ère enquête.
Dans ces communes de plus de 10.000 habitants, il est nécessaire de rassembler les données de cinq échantillons de 8 % de logements, sur 5 ans donc, pour garantir une bonne qualité des résultats.
Les communes de moins de 10 000 habitants seront recensées exhaustivement une fois tous les cinq ans. « Comme certaines seront recensées la première année, d’autres la dernière, nous attendrons que toutes le soient pour communiquer les résultats, dans un objectif d’égalité de traitement des communes », explique Jamel Mekkaoui, directeur de l’INSEE Mayotte. Il va donc falloir attendre 5 ans après la 1ère enquête de 2021, donc 2026, pour avoir le prochain recensement.
8 ans sans remise à jour
Et donc patienter 8 ans sans rien à se mettre sous la dent ! « Les premiers résultats de population seront diffusés à partir du 1er janvier 2026, à la fin du premier cycle de cinq ans », confirme-t-il. Une conséquence négative donc de cet arrêt de l’exception mahoraise dans la loi EROM. « Nous avions prévenu qu’un recensement annuel, ne se traduit pas par des résultats annuels, du moins pas immédiatement. »
Ce délai de 8 ans, qui s’apparente à une « montée en charge », a été le même dans les autres communes de France, qui ont vécu leur transition entre 1999 et 2009. « Les populations de chaque commune seront ensuite mises à jour tous les ans. La deuxième actualisation interviendra ainsi dès le 1er janvier 2027 ». Une fois mise sur les rails, la méthode coulera de source.
Mais entretemps, il faudra se passer de données, « notamment les résultats détaillés en terme de pyramide des âges, de proportions de population étrangère, etc. Il n’y aura pas de remise à jour de ces statistiques ». Frustrant quand justement Mayotte commençait à bénéficier de données plus détaillées.
Les communes aux manettes
Nous avons donc interpellé Jamel Mekkaoui sur la possibilité de mettre en place un recensement global sur l’échelle de l’île en 2023, comme ce fut le cas en 2017, en attendant que la nouvelle formule produise quelque chose, mais le statisticien nous a tout de suite arrêté, « nous n’avons plus de cadre légal pour le faire ».
Si les communes de métropole sont passées par ce stade elles aussi, le rythme de croissance de la population n’est pas le même. Huit ans sans recensement, cela va forcément impliquer l’absence de réévaluation des dotations et autres péréquations nationales…
Dernière nouveauté introduite par la réforme, les communes seront aux manettes de leur propre recensement. « Elles recruteront seules les agents recenseurs et les encadreront au quotidien. Elles utiliseront les mêmes outils informatiques que les autres communes françaises ». L’INSEE continuera d’organiser et de contrôler le bon déroulement du recensement en lien étroit et continu avec les communes.
Les conséquences techniques du changement législatif sont donc lourdes pour Mayotte, il va falloir se pencher rapidement sur de possibles aménagements pour ne pas tomber dans un « trou noir » de 8 ans en matière de données statistiques.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.yt
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